Un met fait avec une dose de joie et d’héritage
Un tour des “tabuleiros” de Salvador
(*Tabuleiro: une échoppe faite de bois ou de verre, où les bahainaises vendent leurs plats) Un beignet farci préparé artisanalement, fait à partir d’une pâte de haricots moulus assaisonnés, puis frits dans de l’huile de palme (dendê). Mettez une dose d’art et d’énergie bahianaise, ajoutez-y une cuillère de joie et une pincée d’héritage culturel, et vous aurez le tant aimé et légendaire Acarajé. En guise de garniture, vous pourrez y ajouter du piment, de la vatapá, du caruru, des crevettes séchées et de la salade de tomates. Outre le fait qu’il constitue une source de revenu pour de nombreuses familles, il a également un caractère symbolique important. Il tire son origine dans le golfe du Bénin en Afrique de l’Ouest (où il est appelé Acará) et a été amené au Brésil avec l’arrivée des esclaves venus de cette région.
A l’origine, toutes les personnes qui produisaient et commercialisaient des acarajés étaient initiées au candomblé, une pratique réservée aux femmes, généralement des Filles de Saints vouées au culte de Shango et Oiá (Iansã). Pour remplir leurs “obligations” vis-à-vis des orishas, pendant la période coloniale, les femmes noires libérées ou des femmes à la recherche de leur liberté préparaient les mets délicats et sortaient le soir dans la rue pour les vendre, donnant lieu à cette coutume. A ce jour, la grande majorité des baianas ne descendent dans la rue qu’à partir de 17h.
Les Baianas de Acarajé font partie du Patrimoine Culturel du Brésil, et nous vous en parlons dans cette rubrique avec précision, ainsi que de leurs délicieuses spécialités. L’idée est que chacun puisse collaborer en y apportant ses meilleures conseils. Nous mettrons donc à jour régulièrement cet itinéraire, en cartographiant les meilleurs acarajés de la ville, qui seront nos et vos préférés. Pour autant, nous n’avons pas l’intention de faire un ordre de préférence, mais de vous faire faire un tour des tabuleiros de Salvador, pour en savoir un peu plus sur les histoires qui ont contribué à faire de l’acarajé un point d’intérêt touristique de la ville. Pour contribuer, envoyez vos suggestions de Baiana de Acarajé à cet email.
Commençons par le commencement : le mémorial das Baianas de Acarajé
Ce site, enregistré à l’Institut du Patrimoine National Historique et Artistique du Ministère de la Culture (Iphan / MinC) en tant que Patrimoine Culturel du Brésil, dispose d’espaces d’exposition et de documentation. Les visiteurs trouveront, par exemple, des accessoires, de l’artisanat et des instruments gastronomiques utilisés par les Baianas de Acarajé. Plus d’informations sur ce lien.
Un métier de mère en fille
Le point de vente de la Baiana est sous licence agréé, il ne peut donc pas être vendu à quelqu’un d’autre et il est transmis de mère en fille. Mais avant même toute légalisation du métier, il était de tradition que le tabuleiro soit transmis à un membre de la famille. Deux baianas très connues en sont des exemples. Dinha, à Rio Vermelho et Tânia Bárbara Neri, au Farol da Barra.
Dinha était l’une des quituteiras (femmes qui préparent des amuses-bouches) les plus connues de Bahia. Au “Largo de Santana”, dans le quartier de Rio Vermelho, où son échoppe a toujours été présente, la place fut affectueusement nommée “Largo da Dinha”. Elle fut également la première du genre établie dans le quartier, par la grand-mère de la baiana, la cuisinière Ubaldina de Assis, il y a près de 70 ans. Dinha est décédée en 2008 et son successeur fut sa fille, Claudia de Assis.
Récemment, ce fut aussi le cas de Tânia Bárbara Neri, une baiana bien connue qui se trouvait juste devant le Farol da Barra. Tânia est décédée au début du mois de novembre 2018. Ses enfants Ana Cássia et Anderson ont repris la relève. En l’occurrence, c’est déjà la cinquième génération de Baianas de Acarajé; l’arrière grand-mère, la grand-mère, la mère et Tânia elle-même. Maintenant, ses enfants le sont aussi devenus, et sa petite-fille de 7 ans est déjà en formation.
Acarajé da Dinha – R. João Gomes, 25 – Rio Vermelho, Salvador – BA, 41950-640. Ouvert tous les jours. Du lundi au mercredi de 17h à 22h. Jeudi et vendredi de 17h à 00h. Samedi et dimanche de 11h à 22h.
Acarajé do Farol (Tânia Bárbara Neri). – devant le Farol da Barra. 206, R. do Gavaza, 24 – Barra, Salvador – BA, 40140-650
Les ingrédients
Pour la pâte à beignet, vous aurez besoin de 800 g de haricots blancs, 80 g d’oignons râpés, 500 ml d’huile de palme, ajouter le sel à votre convenance. Laisser tremper les haricots pendant cinq à six heures. Ensuite, éplucher les haricots et les broyer. Chaque Baiana a sa propre façon de faire, certaines utilisent le pilon acarajé, d’autres le font dans un broyeur manuel, et certaines utilisent des mixeurs électriques. Ajouter l’oignon et le sel. Certains disent que “le mystère” se produit à ce moment-là, au moment de mélanger la pâte. Faites une boule de pâte avec la cuillère, et mettez-la à cuire dans l’huile de palme bouillante.
En utilisant la même recette, chaque baiana aura un résultat différent. Par exemple, Cira, Regina et Glorinha, toutes les trois sont à Rio Vermelho – connu comme le quartier bohème de Salvador, mais qui pourrait également être nommé le quartier à acarajé, chacune a sa façon de faire. La pâte de l’une est plus croustillante, l’autre sera plus “charnue”, alors que la dernière sera plus petite. L’une met de grandes crevettes, l’autres des plus petites et la troisième est connue pour enlever la tête, ce qui facilite la dégustation (idéal pour les “débutants”). L’une le servira avec une salade de tomates fraîche spectaculaire, alors qu’une autre s’en passera. À Pituba, Daria et Laura ont un tabuleiro bien populaire, considéré comme l’un des meilleurs acarajés de la ville.
Cira – Avec 50 ans d’activité à son tabuleiro, a déjà été élue plus de 10 fois comme le meilleur acarajé de Salvador. Elle a quelques adresses dans la ville, les deux plus connues sont à Largo da Mariquita, à Rio Vermelho, et l’autre sur la place qui mène à Lagoa do Abaeté, à Itapuã. En plus de l’acarajé et de l’abará, les cocadas y sont délicieuses.
Acarajé da Cira – Largo da Mariquita – Rio Vermelho, Salvador – BA, 41940-426. Du lundi au vendredi, de 15h à 22h. Samedi, de 14h à 00h. Dimanche, de 14h à 22h30. Itapuã – Itapuã – Rua Aristides Milton, s/nº (en face de Ladeira do Abaeté), Itapuã. Il n’y a pas de numéro de téléphone. 10h / 22h30 (vendredi et samedi jusqu’à 23h30).
Regina – Avec son tabuleiro établi à Rio Vermelho depuis plus de 30 ans et un autre à Graça, Regina dos Santos Conceição, outre l’acarajé, elle est également réputée pour l’un des meilleurs abarás de la ville. Dans son échoppe, les fans de sucreries trouveront de quoi ravir leurs papilles avec les “cocadas” de noix de coco blanche et les “cocadas” caramélisées avec des cacahuètes, ainsi qu’un excellent “bolinho de estudante” (un gâteau à base de tapioca, noix de coco, sucre et cannelle).
Acarajé da Regina – Largo de Santana, s/nº, Rio Vermelho, Téléphone: +55 (71) 3232-7542. 15h / 22h (samedi, dimanche et vacances de 10h30 / 20h); Rua da Graça, s/nº, devant le collège Sartre, Graça. Jeudi et vendredi 16h / 21h30. Ouvert en 1979.
Glorinha – L’exemple d’une baiana qui devint l’amie des locaux. Il est commun d’y apercevoir quelqu’un discutant avec elle, assis à côté, tout en mangeant son acarajé. Avec presque 30 ans à Rio Vermelho, elle connaît pratiquement tous les clients par leur nom, par contre elle ne fait crédit à personne. Des phrases amusantes sont affichées sur son “tabuleiro”, telle que: “La maison fait crédit uniquement aux personnes âgées de plus de 90 ans, accompagnées de leurs parents”.
Acarajé da Glorinha – Rua Almirante Barroso, S/N, Rio Vermelho, Salvador, Bahia. Se trouve proche de l’angle de la rue “Cardinal da Silva”. Du mardi au dimanche, de 17h à 22h.
Acarajé Dária e Laura – Avec trois décennies de vente d’acarajés, Dária et Laura vendent également des bolinho de estudante, des cocadas et passarinha. Rua dos Maçons, s/nº, à l’angle du Supermarché Redemix, Pituba, 3461-1452. 17h/21h (fermé le dim.). Ouvert depuis 1986.
Le tabuleiro et la robe
Dans un tabuleiro peuvent également se vendre d’autres “aliments de bahianas” tels que l’abará, passarinha, mingaus, lelê, bolinho de estudante, cocadas, pé de moleque, etc. Mais il existe de nombreuses façons de mieux connaître les valeurs historiques, sociales, religieuses, esthétiques et gastronomiques qui caractérisent le métier de “baianas de acarajé”. La robe de la bahiana en est un exemple; elle rassemble de nombreux éléments visuels du style baroque européen, à travers ses nombreuses broderies et dentelles. C’est une pratique multiculturelle: huile de palme, fichon de coton, traditionnel broderie richelieu, parfum à la lavande et figue, boucle d’oreille faite de coquillages et aussi la manière de se comporter…
A Salvador, vous trouverez des acarajés d’un real et parfois même d’un kilo! Des célèbres baianas du bord de mer, aux préférées de chaque quartier, qui n’a pas une bonne histoire à raconter? En banlieue par exemple, Anderson Simplício donne de bons conseils sur son profil Instagram “Belezas do Subúrbio” (“Beautés des banlieues). Il raconte que l’acarajé de Dona Ninha est pratiquement devenu un point d’intérêt touristique à São Tomé de Paripe. Elle y fait une cocada aux cacahuètes qui donne l’eau à la bouche rien qu’en la regardant!
Acarajé de un real. Dans le centre-ville, et en particulier sur l’avenue Sete de Setembro, il est facile d’en trouver à ce prix. Les plus recherchés se trouvent juste devant l’horloge de Saint-Pierre, devant la banque Caixa Econômica. À l’autre bout de la ville, il y en a aussi un à la Ladeira do Abaeté, à Itapuã.
Acarajé de 1 kilo. L’un des plus célèbres se trouve à la Ladeira São Cristovão, dans le quartier de Liberdade. Le plus grand beignet d’acarajé peut atteindre jusqu’à 15 cm et l’abará géant peut mesurer jusqu’à 22 cm. La délicatesse s’adresse davantage à la clientèle du soir, puisqu’elle commence à vendre à partir de 22h. Un autre connu sous le nom de “Exagero de Acarajé” (“Exagération d’Acarajé”) se trouve à Ladeira da União, 4 – Engenho Velho de Brotas. On dit qu’il faut le tenir avec ses deux mains !
Si vous voulez apprendre à faire l’acarajé, et en apprendre davantage sur l’histoire de cet plat et vous promener dans le marché de São Joaquim, vous devez rencontrer Lilia Almeida. Elle y donne des cours au sein du marché, réputés pour être “superlegal” (super sympa). Lilia explique que “acará” signifie “boule de feu”, et “jé” signifie “manger”: “C’est un aliment d’une force ancestrale qui nous remplit de “‘axé” et nous nourrit de culture”, dit-elle. Elle nous donne même un conseil sur l’acarajé de Dona Ivete. Son magasin se trouve au bout de la “rua nova de acarajé” (“nouvelle rue d’acarajé”) ; il suffit de demander à un marchant sur place, car tout le monde sait où il se trouve, au marché de São Joaquim. Informations sur les cours par Whatsapp: +55 (71) 99951-7907.
Nous vous avons même préparé une liste de chansons parfaite pour cette expérience. Ecoutez ça!